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HOUSTON - Thomas BLOCK HUMERY

35.00 / Épuisé / Sold Out

HOUSTON

de

Thomas BLOCK HUMERY

Alberto Art Books, 21x29,7cm, 64p. 35€ (anglais)

« Houston » n’est pas un livre comme les autres. Par le biais particulier de l’autobiographie, il  invite à parcourir, ou à imaginer, la moins connue des grandes mégalopoles américaines. À côté de Los Angeles, New York, Miami ou Chicago, cette ville du Texas n’a rien de la ville de carte postale. Elle en est peut-être même l’antithèse avec ses quartiers très étendus, ses autoroutes qui la divisent, pour ne pas dire la tranchent et son « downtown » accablé par la chaleur en été. Pourtant c’est là que Thomas BLOCK HUMERY nous invite à concevoir la ville au-delà des considérations urbanistiques, socio-économiques ou culturelles, en mettant l’accent sur la dimension intime comme dynamique de connaissance. Il voit la ville avant tout comme un lieu de projection de soi validé par l’amour, l’ambition, la réalisation de soi, le confort esthétique et d’autres grandes espérances difficilement quantifiables.

La ville est ici liée au sentiment et à l’émotion. Selon cette proposition, l’auteur dépasse les descriptions de géographie humaine, faites de courbes démographiques, de statistiques économiques ou de taux d’activité, pour ne conserver que la perspective individuelle faite de ressenti, d’adaptation, de partage, de liens possibles, de visions changeantes, traversée par la contingence, la délicatesse voire la fragilité de l’expérience. L’espace urbain se déploie selon les modalités de la rencontre qui joue un rôle catalyseur et accélérateur. Houston devient le théâtre d’une interaction où la connaissance de l’espace va de pair avec l’intensification de la relation.

L’auteur revient dix ans après cet épisode vécu et fait le point sur cette connaissance spécifique où des habitudes s’étaient enracinées et où des liens s’étaient noués. Houston est alors un décor de théâtre où des scènes réelles se sont jouées, un décor qui a lui-même changé, transformé par les forces inhérentes et spécifiques des villes américaines pour lesquelles une décennie est déjà une fraction importante du temps. La ville et son visiteur se retrouvent comme deux amants qui n’arrivent plus vraiment à communiquer. On dit que les criminels reviennent toujours sur les lieux de leur crime. Qu’en est-il de la personne qui revient sur les lieux d’une histoire passée ?

Le projet pose ici la question : peut-on montrer ça en images ? La réponse est ambiguë, avec des oui et des non, car les images, malgré leurs limites, peuvent traduire la présence et l’absence, le rêve et la réalité, le passé et parfois la précarité du présent. Thomas Block Humery s’amuse à rendre la ville de Houston labyrinthique, parcellaire, géométriquement abstraite et peut-être même chimérique, comme lorsque l’on veut recoller un bout de vie à un autre.

Le livre est plein de poésie et de profondeur où il est question d’un photographe qui ne voit plus que des métaphores plutôt que le réel. Le projet devient une autofiction et la réponse qu’il propose prend la forme d’une œuvre d’art. Il est question de relations à distance, de publicités détournées d’un âge d’or, de façades de buildings qui font écran, de temps qui passe, du souvenir de “Paris, Texas”, de la flore locale, d’appareils photo et de négatifs vierges. La ville devient une utopie, avec des souvenirs qui reviennent et des futurs qui se dessinent.

Le projet prend une place particulière aujourd’hui à l’heure où beaucoup d’entre nous sont tentés d’aller vivre « ailleurs », où une nouvelle forme de nomadisme s’implante dans des modes de vie changeants. L’expérience montre ici un phénomène de fragmentation, où la vie n’est plus une simple ligne droite mais une succession de moments où l’enracinement semble se faire à différents coins du globe, dans une sorte d’atomisation des destins pris dans une multitude de potentialités. Thomas Block Humery ne tranche pas sur la morale de l’histoire. Il accepte les espoirs comme les échecs et les prend comme les ferments d’une vie qu’il préfère romanesque que totalement maîtrisée.

La description de « Houston » ne saurait être complète sans la mention texte de l’auteur qui fait partie du projet, un texte en forme de confession qui contextualise le corpus d’images et qui fait entrer, pas à pas, le lecteur dans une sphère secrète où chacun peut un peu se retrouver.