HALLES
soleil, climat, cohue
sous la direction de Raphaël MÉNARD
AREP, 23x17,5cm, 131p., illus., cartonné, 22€
" Récemment, nous avons livré une halle à vélos à Paris. Cette structure couvre presque 2 000 m² et s’insère dans les 12 ha de la gare du Nord. Cette halle affirme sa sororité avec ses voisines : nous l’avons imaginée comme une conversation dans le temps, en proximité avec les halles monumentales d’Hittorff (1866), et celle, transparente et aérienne, livrée en 2001. Pièce neuve à cette composition qui débuta en 1846, cette construction protège 1 200 bicyclettes et leurs utilisateurs. Elle favorise ainsi l’usage métropolitain du vélo et démultiplie l’interaction de la petite reine avec les autres modes de déplacement frugaux : train, métro, bus, marche à pied… Cette gare à vélos est une géométrie simple. Des poutres de bois posées sur une crinoline d’acier galvanisé. Elles se croisent, de façon alternée, en papillon, pour recevoir des lanterneaux au faîtage. La couverture, qui protège des intempéries, est faite de vitrages photovoltaïques. Cette halle produit ainsi des électrons (ou plus exactement les fait tourner, comme les vélos qu’elle protège), contribuant au dessein renouvelable du monde ferroviaire et des mobilités décarbonées. Le volume est ventilé naturellement ; l’espace est éclairé par le moucharabié des cellules solaires et par les lanterneaux, composés d’une quarantaine de vitrages, datant de 1977 : ils viennent du Centre Pompidou, un voisin à quelques hectomètres à vol d’oiseau… Une seconde vie pour la fameuse chenille, greffée dorénavant sur cette gare à vélos.
Concevoir et fabriquer cette halle nous a donné envie d’élargir notre regard. Nous sommes partis à la rencontre de cette famille d’architectures faussement banales. Ce type de construction comprend une grande diversité de géométries, et pas uniquement la forme typique et commune à beaucoup de halles à trains – appelées dans le jargon ferroviaire GHV, pour grandes halles voyageurs – comme celle de la gare du Nord ou celles d’autres gares parisiennes, Saint-Lazare ou Austerlitz. Les halles présentent une multitude de modes constructifs et de matériaux : maçonneries de pierre, voûtes de brique, ossatures de fer, poteaux de fonte, treillis d’acier, membranes de verre, charpentes en bois, coques en béton, etc. Les halles offrent aussi une myriade d’ambiances (lumineuses, thermiques, acoustiques, olfactives), expérience polysensorielle propre à chacune : la halle est « un temple », en se risquant à paraphraser Baudelaire, où se côtoient de « vivants piliers » (nos semblables), un lieu qui mobilise le regard, l’ouïe, et parfois l’odorat (surtout dans les halles gourmandes des marchés barcelonais, comme le mercat del Born ou le mercat de Sant Antoni). Cette famille d’architectures abrite un incroyable panel d’usages, évoluant d’ailleurs parfois au fil des âges : marchés, lieux de transports, espaces d’expositions, sportifs, industriels, agricoles, horticoles…"
Raphaël MÉNARD, Président d’AREP